L’article L. 4121-1 du Code du travail : Ce texte qui pourrait sauver vos équipes (si on daignait enfin l’écouter)
Il y a des lois qui dorment, discrètes, dans les recoins poussiéreux des codes juridiques. Des textes qu’on effleure en formation, qu’on cite en réunion pour faire sérieux, puis qu’on range soigneusement au placard. L’article L. 4121-1 du Code du travail en fait partie. Pourtant, il porte en lui une révolution silencieuse : et si le travail, au lieu de broyer les individus, les protégeait ?
Imaginez un monde où les burn-out ne seraient plus des fatalités, où les arrêts maladie pour dépression ne exploseraient pas les budgets des entreprises, où les open spaces ne résonneraient plus de soupirs étouffés. Ce monde existe. Il est écrit, noir sur blanc, depuis des années. Alors pourquoi continue-t-on à faire semblant de ne pas le voir ?
Un article de loi comme une promesse oubliée
« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »
Ces mots, c’est la loi qui les prononce. Pas un vœu pieux, pas une recommandation floue, mais une obligation, aussi concrète que celle de payer un salaire. Pourtant, combien d’entreprises les prennent vraiment au sérieux ?
Trois piliers y sont gravés :
- Prévenir – anticiper les risques avant qu’ils ne deviennent des drames.
- Former – donner à chacun les clés pour comprendre ce qui le menace.
- Adapter – façonner le travail autour de l’humain, et non l’inverse.
Et depuis 2020, un détail qui change tout : la santé mentale y est nommée. Plus question de se cacher derrière des excuses floues. Le législateur a parlé. Le reste n’est qu’une question de volonté.
Le prix de l’indifférence (ou comment perdre des millions sans s’en rendre compte)
Ignorer cet article, c’est comme laisser une fuite d’eau dans un mur : on ne la voit pas tout de suite, mais un jour, tout s’effondre.
Quelques chiffres pour y voir plus clair :
- 50 000 €. C’est le coût moyen d’un burn-out pour une entreprise (Malakoff Humanis, 2024). Entre les indemnités, le remplacement, la perte de savoir-faire, et cette énergie dépensée à éteindre des incendies qu’on aurait pu éviter.
- 13 à 20 milliards d’euros par an. La note salée de l’absentéisme et des RPS pour l’économie française (Dares, 2023). De quoi construire des hôpitaux, former des milliers de soignants, ou… financer des politiques de prévention, justement.
- 6 à 12 mois. Le temps qu’il faut à un salarié pour se relever (INRS, 2024). Douze mois de salaires versés pour un fantôme, douze mois de compétences en jachère, douze mois de silence gêné dans les couloirs.
On parle souvent des coûts de la prévention. Mais qui calcule ceux de l’inaction ?
La psychologie du travail, ou l’art de prendre la loi au mot
Dans mon cabinet, je vois défiler des visages. Des yeux cernés, des voix qui tremblent un peu, des mains qui serrent trop fort un mouchoir en papier. « Je n’en peux plus, mais je ne peux pas partir. » « Mon manager ne comprend pas. » « On nous demande toujours plus, avec toujours moins. »
Ce que ces personnes vivent, l’article L. 4121-1 était censé l’empêcher.
Alors comment faire pour que ce texte sorte enfin des tiroirs ?
- Écouter, vraiment écouter
Un audit des risques psychosociaux, ce n’est pas une case à cocher. C’est tendre l’oreille vers ceux qui, chaque jour, font vivre l’entreprise. Leurs silences en disent souvent plus que leurs mots.
- Former ceux qui dirigent
Un manager, ce n’est pas un chef. C’est un gardien d’équilibre. Lui apprendre à repérer les signes de souffrance, à désamorcer les conflits, à doser la pression, c’est lui donner les outils pour protéger son équipe – et, in fine, l’entreprise.
- Oser repenser l’organisation
Et si on arrêtait de croire que la performance rime avec l’épuisement ? Flexibilité, reconnaissance, équilibre : ces mots ne sont pas des utopies. Ce sont des leviers de productivité.
- Créer une culture, pas une politique
La prévention ne se décrète pas. Elle se vit. Elle s’incarne dans ces petits riens : un « comment ça va ? » sincère, une porte ouverte, un droit à l’erreur sans sanction.
Et si on arrêtait de compter les coûts… pour commencer à compter les vies ?
Derrière les chiffres, il y a des histoires. Celle de Claire, 38 ans, en arrêt depuis 8 mois après un burn-out. Celle de Thomas, manager, qui ne dort plus depuis qu’un de ses collaborateurs a craqué. Celle de l’entreprise qui perd 20 % de son chiffre d’affaires parce que ses équipes tournent à moitié vides.
L’article L. 4121-1 n’est pas une contrainte. C’est une main tendue. Une chance de dire : « Et si on faisait autrement ? »
À vous maintenant
Cette loi, vous pouvez : ✅ L’ignorer (et continuer à payer le prix fort). ✅ La subir (en la voyant comme une paperasse de plus). ✅ Vous en emparer (pour en faire le socle d’une entreprise où il fait bon travailler).
Le choix vous appartient.
« Le travail devrait être un lieu d’épanouissement, pas de survie. » Anne-Charlotte Dupond


